Monsieur Thibert est paysagiste à Izeure en Côte-d’Or et s’est spécialisé dans la création d’espaces paysagés en utilisant du gravier. Il réalise de magnifiques allées pour des particuliers ou des golfs, et même des cours intérieures, des espaces de jeux ou des parkings.
Un jour, il décide de faire le bilan de l’année avec son équipe pour définir des axes de progrès et s’améliorer.
– Que pourrions-nous améliorer dans notre manière de faire ? Demande le paysagiste à son équipe.
– On manque cruellement de matériel pour travailler, répond un jardinier, notamment des plaques vibrantes pour damer les graviers.
– Pourtant, nous en avons déjà 2, c’est pas suffisant ?
– Bien sûr que non, on est obligé de revenir ratisser et damer les graviers tous les 3 mois chez nos clients. Les véhicules créent des ornières à force de passer aux mêmes endroits.
– Et que faudrait-il faire pour éviter de revenir x fois chez nos clients pour ces réclamations ?
– Il faudrait que les graviers ne bougent pas, mais ça c’est juste pas possible. Des graviers, ça bouge avec le temps, c’est comme ça…
– Réfléchissons tout de même. Que faudrait-il faire pour stabiliser les graviers ?
– On pourrait peut-être les damer plus longtemps, répond un autre jardinier.
– Malheureusement, ça ne ferait que retarder le problème, mais sans vraiment le résoudre. Non, il nous faudrait une solution plus durable. Parlons-en avec notre fournisseur de matériaux. Lui pourra peut-être nous aider.
Quelques jours plus tard arrive le rendez-vous avec le fournisseur.
– Voilà notre problème, lance le paysagiste, on cherche une solution pour éviter que les graviers forment des ornières dans nos allées.
– C’est le problème des graviers, répond le fournisseur, ça bouge tout le temps. L’idéal est de passer sur des pavés autobloquants, là vous êtes tranquille ça ne bougera plus.
– Je vous rappelle qu’on est spécialisé dans le gravier, on ne va pas tout changer comme ça. Non, il nous faut une solution pour le gravier. Il y a bien quelqu’un qui a déjà eu ce problème avant ?
– Dans notre domaine, tout le monde a le même problème vous savez. Ça fait 30 ans que je suis dans le métier et ça a toujours été comme ça.
– Et dans d’autres domaines, le problème n’existe pas ?! Par exemple comment font-ils dans le ferroviaire pour que le ballast reste en place sous les rails suite aux passages des trains ?
Et soudain apparaît l’idée astucieuse !
– Et oui, répond le fournisseur, on pourrait comme pour le ballast utiliser des structures tridimensionnelles en forme de nid d’abeilles en toile géotextile. Il suffit juste de l’adapter à notre besoin. Et hop, le tour est joué !
Cette structure alvéolaire en nid d’abeilles permettant de stocker le ballast dans des compartiments a été inventée en 1994 par les japonnais MURATA OSAMU, SEKINE ETSUO et TARUMI HISASHI sous le brevet n° JPH0827701A. Ce système offre une solution durable et peu coûteuse pour stabiliser le ballast.
Désormais, ce système de stabilisateur drainant est largement répandu dans le monde du paysagisme. Par exemple, la société Dupont propose le concept Ground-Grid réalisé en toile géotextile non-tissée.
On peut retenir 3 faits majeurs de cette histoire d’innovation :
1 – Tout d’abord, le paysagiste a réuni son équipe pour faire le point et définir des axes de progrès. Cela témoigne de sa volonté de challenger son équipe et de ne pas s’endormir sur ses lauriers.
2 – Ensuite, le paysagiste a cherché la cause du problème et il n’a pas hésité à provoquer un rendez-vous avec son fournisseur pour élargir la réflexion en s’ouvrant sur l’extérieur.
3 – Enfin, dans la discussion, le paysagiste a transposé la réflexion dans un autre domaine. C’est l’élément qui a permis au fournisseur de trouver la solution par analogie.
Cette histoire d’innovation toute simple nous montre le cheminement naturel d’une idée et la nécessité de voir au-delà des évidences. Cela nous montre aussi le rôle du collectif pour aller plus loin dans la réflexion et le levier puissant qu’est l’analogie. Si vous avez un problème à résoudre, il est probable qu’il soit déjà résolu dans un autre domaine.
Pour en savoir plus, je vous invite à découvrir comment la méthode TRIZ permet d’exploiter de manière ludique le principe d’analogie à travers les 40 principes d’innovation.
Voilà, c’est la fin de cet article. Si vous avez trouvé le contenu intéressant, n’hésitez pas à poster vos commentaires ou vos questions en bas de cette page, et à le partager avec vos amis ou vos collègues si vous pensez que ça pourrait leur être utile ! 🙂