La matérialisation rapide des idées facilite l’ancrage dans le monde réel. C’est un processus itératif utile pour rendre tangible un concept avant de s’engager plus.

Il nous est tous arrivé de croire à une solution magique qui après un premier croquis ne tenait pas vraiment la route. Ou une idée qui semblait prometteuse sur le papier, et qui ne fonctionnait pas une fois matérialisée. Et oui, je sais quelquefois ça fait mal ! D’autant plus lorsqu’on a déjà investi beaucoup de temps…

Le processus créatif est une succession d’essais et d’erreurs, d’euphories et de désillusions. C’est la raison pour laquelle, il vaut mieux y être préparé et s’attendre à de nombreux allers-retours.

De ce fait, il est intéressant de varier les représentations d’une idée au plus tôt pour mieux en percevoir les contours et les limites. Plus vite les premiers problèmes apparaîtront, plus vite vous saurez les solutionner à moindre coût. L’idée est de faire mûrir vos idées en avançant pas à pas vers une matérialisation.

La matérialisation de vos idées

Appréhender la complexité pas à pas

Rome ne s’est pas fait en un jour, et vous vous en serez douté, ce ne sera pas le cas non plus pour votre projet d’innovation. Par expérience, les choses ne sont jamais aussi simples que ce qu’on imaginait au départ.

C’est la raison pour laquelle, il est préférable d’avancer pas à pas. Et si possible avec de petits pas rapides. C’est ce qui vous permettra d’être plus agile et de corriger le tir au plus tôt si besoin. La magie de « faire » c’est accepter de créer et de comprendre en même temps. C’est l’idée d’apprendre à marcher en marchant. 

Un équilibre entre réflexion et action

Le « faire » n’est pas une démarche qui remplace l’analyse d’un problème ou la réflexion pour faire émerger une solution. C’est vraiment une démarche complémentaire : la main est le prolongement de l’esprit.

Celui qui s’inscrira trop longtemps dans une démarche théorique sans passer à l’action risque de s’éterniser sur des problématiques et de ne pas concrétiser une solution. 

En revanche, celui qui passe tout de suite dans le « faire » risque de passer à côté de la compréhension de certains problèmes ou d’aller trop vite vers une solution évidente. Il y a le risque aussi de privilégier une solution facilement réalisable aux dépens d’une autre solution plus innovante.

Une démarche pluridisciplinaire

Le génie créatif est donc autant une histoire de réflexion que de « faire ». À l’image des grands inventeurs du siècle dernier, il est intéressant de se questionner sur la pluridisciplinarité de la démarche créative. 

On a construit une société où tout le monde se spécialise aux dépens d’une vision multidisciplinaire qui auparavant apportait une richesse au processus créatif. Personnellement, je trouve intéressant justement d’avoir plusieurs cordes à son arc pour pouvoir mieux appréhender les choses dans leur globalité et innover plus efficacement.

La contrainte du temps

De nombreux innovateurs manquent de temps et c’est peut-être votre cas. C’est pourquoi il faut privilégier des modes d’action rapides et ne pas chercher la perfection. Gardez en tête qu’une idée naît toujours imparfaite, alors autant l’accepter.

De cette contrainte limitée par les moyens mis à disposition et par l’urgence du moment naît une certaine forme de créativité. Cela force l’esprit à travailler par intuition, ce qui dans bien des cas est suffisant voire souhaitable.

J’ai récemment eu la chance de participer à l’organisation du Crunch Maker Camp. C’est un hackathon organisé par le Crunch Lab de l’UTBM (Université de Technologie de Belfort Montbéliard). Pour bon nombre de participants, cet exercice a été une révélation. En 48 heures, ils ont pu analyser des problèmes, trouver des solutions et surtout les matérialiser. Tous les acteurs de cet évènement ont été étonnés qu’en si peu de temps il soit possible de faire tout ça !

Comment faire pour matérialiser vos idées pas à pas

1.    La préparation

Lorsqu’on s’interroge sur la représentation d’un problème et d’une solution, il est utile de s’interroger sur la zone et le temps opératoire : c’est-à-dire définir où et à quel moment agir. Plus vous serez « focus » sur le problème à traiter, plus vous serez à l’aise pour énoncer et représenter votre solution de manière ciblée et proportionnée. 

Dans une logique de recherche de solution idéale, il est intéressant également de s’interroger sur des grandeurs physiques qui sont enjeux. En tant que concepteur ou innovateur, c’est sur ces grandeurs que vous devez agir en priorité. Le fait de s’interroger sur ce qui est important dans la résolution d’un problème permet de le représenter de manière efficace et d’innover au cœur du système.

Par exemple, si vous êtes fabricant de fauteuils roulants et que le problème est la difficulté pour des personnes à mobilité réduite de se déplacer sur le sable, il ne semble pas opportun de remettre en cause le concept même de fauteuil roulant. Il s’agit dans ce cas de représenter le problème et la solution au niveau du contact entre la roue et le sable. Il s’agit d’un problème de poids et de surface de contact.

2.    Énoncer l’idée

Au début évidemment la démarche est abstraite et intérieure. Votre esprit vagabonde entre la compréhension du problème, vos connaissances et la proposition des premières pistes de solutions. 

Bien souvent, c’est au moment d’expliquer à quelqu’un ce que l’on a en tête que les pièces du puzzle commencent à s’assembler. L’énoncé d’une idée est un premier exercice qui éprouve sa pertinence. On mesure aussi l’importance d’utiliser les mots justes pour décrire les choses avec précision et pertinence. C’est pourquoi il est important de connaître et s’approprier le vocabulaire du domaine.

C’est aussi un moment où il est possible de mimer la solution. Quelquefois un geste peut être un déclic. Cela permet aussi aux autres participants d’interagir plus facilement et de se rendre compte de certains critères ergonomiques.

Par exemple ce qui a inspiré le créateur de la tente 2 secondes, c’est avant tout le geste de lancer la tente pour qu’elle s’autodéploie. Cette gestuelle a guidé l’équipe tout au long du projet jusqu’à la commercialisation du produit : la promesse a été tenue ! 🙂

3.    Représenter l’idée

Dessiner rapidement un croquis

La représentation d’une idée passe bien souvent par la réalisation d’un croquis. Je dis « bien souvent », car j’observe souvent le mauvais réflexe de passer tout de suite sur la CAO. C’est selon moi une erreur, car il vaut mieux en un premier temps éprouver une idée avec des moyens plus simples et plus rapides. 

Par ailleurs, cela vaut la peine de dessiner les choses à l’échelle pour éviter de mauvaises surprises. Le dimensionnement est une contrainte qu’il ne faut pas sous-estimer pour éviter de se faire aveugler par un problème de représentation.

Décrire l’usage

Ensuite, il intéressant de vous questionner pour savoir quelles situations d’usage sont à représenter : l’usage du produit, mais également avant et après. Lorsqu’on dessine un croquis, il est aussi utile de dessiner l’utilisateur s’il est en prise directe avec le produit pour voir justement comment le produit interagit avec lui. 

Pensez également à dessiner un croquis dans plusieurs vues. Cela permet de matérialiser les choses différemment et d’améliorer la vision globale du concept. Le simple fait de changer de point vue ouvre souvent de nouvelles perspectives.

S’inspirer de dessins existants

Si vous avez des difficultés à représenter les personnes et les objets, n’hésitez pas à consulter des sites comme Dimensions.com qui proposent de nombreux dessins facilement utilisables. En quelques secondes, vous passerez à un niveau professionnel ! 🙂

Si on reprend l’exemple du fauteuil roulant qui roule sur le sable, voici des illustrations directement téléchargeables sur le site.

Illustration d’un fauteuil roulant avec plusieurs vues différentes. Source Dimensions.com

4.    Matérialiser l’idée

L’esprit Maker : quick & dirty

Arrive maintenant le temps de matérialiser votre idée. Je vous conseille vivement de privilégier en un premier temps une matérialisation sous une forme Quick & Dirty. C’est-à-dire un maquettage rapide sans chercher à soigner les détails. Pour cela, vous pouvez utiliser des matériaux et les outils de base que vous avez sous la main : carton, bois, Lego, scotch, sangle, pièces récupérées, etc.

Mise en scène de l’usage d’un passage piéton pour une personne à mobilité réduite – Crunch Lab de l’UTBM.

Si votre idée représente un usage avec une mise en scène, dans ce cas votre maquette pourra être de taille réduite. Vous pouvez par exemple utiliser des Legos, des Playmobils ou tout autre accessoire. L’idée est de pouvoir « jouer » le scénario d’usage que vous avez en tête.

Si votre idée représente un produit, dans ce cas il vous faudra réaliser une maquette à taille réelle si cela est possible évidemment. Puis il est toujours intéressant d’aller plus loin dans la représentation notamment avec la possibilité de manipuler l’objet pour se rendre compte des problématiques ergonomiques.

Des petits pas rapides et agiles

Dans tous les cas, cherchez avant tout à procéder pas à pas avec des moyens rapides qui permettent la matérialisation de vos idées et de tout de suite en tirer un enseignement. Cherchez des améliorations successives plutôt que d’investir un temps long sur une définition précise qui finalement n’est peut-être pas la bonne et vous fera perdre du temps. Il vaut donc mieux chercher à faire des petits pas rapides et agiles plutôt qu’un grand pas qui peut-être ne sera pas le bon.

Un autre point important dans le mode de représentation est tout simplement la magie de « faire ». Le simple fait de matérialiser des idées avec ses mains permet là aussi de se faire une nouvelle représentation de la solution. Tous nos sens sont en éveil ! De plus, comme vous vous en doutez c’est un excellent moyen de communication.

Faire : ici et maintenant

La magie du « faire » doit s’associer à une certaine urgence. Il ne s’agit pas de faire plus tard ou de remettre au lendemain la réalisation d’une maquette. L’idée est d’envisager le « faire » comme un acte créatif avec les moyens du bord : faire ici et maintenant !

Si vous pensez ne pas avoir assez de moyens, pensez à solliciter un fablab près de chez vous qui saura vous aider dans la démarche et vous proposer des solutions.

Matérialisation d’une roue avant de fauteuil roulant réalisée à l’UTBM Innovation Crunch Lab.

Et maintenant ?

Avec ce recul sur les différents modes de représentation, vous vous rendez sans doute compte de tout le potentiel qui s’offre à vous. À un moment donné, la main prolonge l’esprit pour bonifier une idée. C’est ce qu’il faut vraiment mettre à profit sur votre projet : passer de vos idées à leur matérialisation le plus vite possible.

Dans le processus d’innovation, il est important de comprendre qu’une idée ne vaut (presque) rien, seule compte son exécution. C’est la raison pour laquelle la matérialisation d’une idée est une étape capitale de votre projet.

Cela dit, si vous n’êtes pas à l’aise avec le dessin, découvrez comment réussir l’illustration de votre idée. Je partage avec vous 7 astuces qui vous permettront de réussir vos présentations.

Puis, si vous avez des doutes sur la bonne manière de faire pour la matérialisation et les étapes suivantes, découvrez comment tirer le meilleur profit de votre prototype. Je partage avec vous 4 secrets qui vous feront gagner du temps dans vos développements.

Voilà, c’est la fin de cet article. Si vous avez trouvé le contenu intéressant, n’hésitez pas à poster vos commentaires ou vos questions en bas de cette page, et à le partager avec vos amis ou vos collègues si vous pensez que ça pourrait leur être utile ! 🙂

    2 réponses pour "Idées et matérialisation : les 4 étapes clés"

    • Jean-Louis

      Bravo Laurent pour cette incitation !
      Notre expérience au sein du SEBLab confirme totalement ces propos : nous avons coutume de dire que la matérialisation des idées fait partie intégrante de la créativité.
      En outre nous avons perçu un bénéfice collatéral à cette phase : l’effet de team building produit par une phase de matérialisation « sous contrainte » temporelle. Ce qui est bénéfique pour l’implication des différents métiers dans la suite du projet.

      • Laurent Cachalou

        Merci Jean-Louis pour votre retour.
        Je partage à 100% votre observation sur l’effet team building : j’ai observé la même chose lors d’un hackathon de 48h que nous avons organisé dans un esprit Maker.
        A très bientôt,
        Laurent

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